La politique monétaire, au même titre que le budget de l’Etat, nous concerne tous. Cependant, elle est généralement ignorée, apparaissant trop complexe, obscure, trop éloignée des préoccupations quotidiennes. Pourtant, ses objectifs et les instruments utilisés pour les atteindre impactent notre porte-monnaie, d’où l’utilité d’en connaître les principaux rouages. Mais qui mène la politique monétaire ? La banque centrale, sorte de super établissement bancaire, appartenant aux institutions publiques sans dépendre du pouvoir politique. Cette indépendance vise à protéger la monnaie de toute utilisation électoraliste et ainsi s’éviter des désagréments à long terme, notamment en matière d’inflation lorsque la planche à billet est trop souvent employée. Outre-Atlantique, la Réserve fédérale (FED) est le banquier central des Etats-Unis. En France, comme dans tous les pays de la zone euro, c’est la Banque Centrale Européenne (BCE) qui conduit la politique monétaire. Aujourd’hui encore le débat demeure sur les prérogatives de la BCE vis-à-vis de la souveraineté nationale, chaque Etat n’ayant plus capacité à user de la monnaie comme outil de politique nationale…
Le rôle de la banque centrale est de réguler la quantité de monnaie en circulation dans l’économie. Les agents économiques, tels les ménages, les entreprises, l’Etat et les administrations publiques, ont besoin d’argent pour échanger entre eux des biens et des services. L’enjeu pour la banque centrale est de déterminer la masse monétaire idoine pour que l’économie fonctionne correctement. Tel est ainsi l’objectif de la banque centrale qui met en œuvre une politique monétaire pour l’atteindre. En effet, trop d’argent en circulation par rapport aux besoins réels que sont la production, la consommation, l’investissement, l’épargne, génère de l’inflation. C’est alors que les prix augmentent et qu’en conséquence le pouvoir d’achat des consommateurs est pénalisé, tout comme les épargnants qui voient la valeur de leurs bas de laine diminuée. Par contre, l’économie se grippe si le volume d’argent en circulation est trop faible eu égard les niveaux d’activités. Il faut imaginer la monnaie comme un fluide permettant aux agents économiques d’échanger entre eux. Si son débit est trop élevé, il emporte avec lui les biens et services dans un courant inflationniste. Inversement, le flux des échanges se tarit faute de liquidité suffisante. Il appartient donc à la banque centrale de réguler ce débit afin qu’il soit régulier et adapté, pour qu’ainsi soit garantie la stabilité des prix et évitée toute sécheresse économique. Finalement, l’action monétaire est destinée à créer un environnement monétaire favorable à une croissance économique maîtrisée.
La banque centrale dispose d’outils pour mener sa mission. Le choix des instruments monétaires est fonction du contexte économique, selon que la pression sur les prix est plus ou moins forte avant leur emploi. Dans les années 70, l’Europe et les Etats-Unis connaissent des taux d’inflation très importants. La lutte contre les tensions inflationnistes est alors la priorité des banquiers centraux. Nous nous trouvons aujourd’hui dans une situation opposée. Le spectre de la déflation anime la politique monétaire à l’œuvre. Même si dans les deux situations l’objectif est le même, à savoir la stabilité des prix, les moyens employés sont différents parce que le contexte économique n’est pas le même. D’ordinaire, l’action de la banque centrale vise à circonscrire l’inflation autour de 2% à la hausse par an. Pour atteindre cet objectif, sont utilisés les taux directeurs, soit le taux d’emprunt demandé aux établissements bancaires par la banque centrale lorsqu’elle leur prête de l’argent, soit le taux de rémunération quand les banquiers commerciaux placent des liquidités auprès de l’autorité centrale.
Ce sont les banques commerciales qui créent de la monnaie en prêtant de l’argent à leurs clients. Et ce sont les emprunteurs qui détruisent de la monnaie en remboursant leur dette. Mais pour que les banques commerciales puissent faire crédit à la clientèle, encore faut-il qu’elles disposent des moyens financiers en conséquence. Pour cela, elles transforment l’épargne de leurs clients en crédit, ou alors elles empruntent auprès d’une autre banque commerciale, voire directement auprès de la banque centrale. Celle-ci en effet est prêteuse en dernier ressort lorsqu’un établissement bancaire se voit refuser toute ressource sur le marché interbancaire. La banque centrale ne prêtant pas gratuitement, les conditions financières qu’elles pratiquent au travers du taux directeur impactent la capacité des banques commerciales à faire appel à elle, donc à créer de la monnaie au travers des crédits qu’elles octroient. Lorsque la banque centrale estime l’inflation trop élevée ou risquant de l’être, elle augmente son taux directeur, ce qui pour les banques commerciales renchérit le coût de la ressource pour financer leur production de crédit. La création de monnaie alors s’essouffle, avec à terme une baisse du volume d’argent en circulation dans l’économie. Le débit monétaire diminuant, le courant inflationniste s’épuise…
La banque centrale diminue son taux directeur pour favoriser indirectement l’activité de crédits, ce qui est utile lorsque l’économie se maintient dans un état anémique. Prêter plus facilement aux banques commerciales permet à celles-ci d’assouplir leurs tarifications de financement proposées à la clientèle. Au final, les clients particulier et professionnel bénéficient de ressources à coût moindre pour consommer et financer leurs projets. L’accès facilité au crédit est censé accroître la demande globale, donc d’entraîner une augmentation de la production nationale pour relancer l’économie. Pour autant, ce mouvement est effectif si les agents économiques sont décidés à emprunter pour financer des projets. La dette est un moyen, et non une fin. Une politique monétaire telle que décrite ici et que l’on qualifie de conventionnelle avec l’ajustement des taux directeurs, produit ses effets si les acteurs économiques y répondent positivement. A défaut, la banque centrale doit employer d’autres outils, moins conventionnels, pour atteindre son objectif de stabilité des prix.
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