Des signaux d'alerte pour témoigner de la fraude
La fraude se distingue de l’erreur par le caractère intentionnel sur lequel elle repose. Tout acte frauduleux ne doit rien à la négligence, à l’inattention, à l’insuffisance, à la nonchalance de son auteur. Au contraire, la fraude exige beaucoup de soin, de conscience, d’intelligence, pour être commise, mais aussi pour en tirer profit secrètement et durablement. Ces efforts et cette implication du fraudeur rendent d’autant plus difficile la détection d’un fait délictueux. Par contre, on imagine aisément des fraudes dont jouisse perpétuellement leur auteur tant que celles-ci sont anonymes, même si faute d’être révélées il est impossible d’en mesurer l’ampleur. Les actes frauduleux dans leur globalité sont ainsi comme une masse informe et obscure que l’on sait existée sans la connaître. D’où le mystère, voire les fantasmes, qui alimente la perception que l’on peut avoir de la fraude. Néanmoins, aucun acte n’est commis sans trace. On ne passe pas de la cause à l’effet sans impacter le réel. D’ailleurs, l’enjeu pour le fraudeur est d’effacer toute trace signalant la nature de ses agissements, ou bien de travestir les conséquences de ses actes. Ainsi, détecter la fraude pour mieux la prévenir ensuite suppose de capter les signaux qui en témoignent.
Les principaux signaux à connaître pour une meilleure prévention du risque de fraude
Les normes internationales de l’IIA n’exigent pas des auditeurs qu’ils aient un niveau de qualification et de compétences équivalents à un professionnel spécialisé dans la prévention et le traitement de la fraude. Néanmoins, les normes stipulent que l’audit doit disposer des aptitudes suffisantes pour identifier, quelle que soit la mission, tout signal laissant à penser qu’un acte frauduleux ait pu être commis. Cet impératif normatif exige professionnalisme et prudence de la part de l’auditeur compte tenu de sa difficulté d’application. En effet, très vite on peut tomber dans l’un ou l’autre des deux travers suivants, à savoir conclure sur l’existence d’une fraude uniquement à partir d’un signal sans investiguer plus avant, donc sans preuve. Ou être sans réaction devant toute anomalie qui finalement se révélerait être une irrégularité. Il n’est donc pas inutile pour l’auditeur d’avoir connaissance des principaux signaux d’alerte nécessitant de sa part des actions complémentaires :
- dispositif de contrôle interne déficient ou inexistant : toute insuffisance majeure constatée en matière de couverture des risques implique que l’auditeur réalise des travaux supplémentaires pour s’assurer que les déficiences relevées ne constituent pas un terrain trop propice à la fraude ;
- cumul des tâches : dès lors qu’un collaborateur ou une collaboratrice concentre des pouvoirs pour engager la société, réceptionner le résultat de cet engagement, comptabiliser l’impact et payer le tiers concerné, cette organisation représente une opportunité pour toute tentative frauduleuse. Dans ce cas, l’auditeur interne vérifiera qu’existe un contrôle indépendant et permanent pour le suivi des opérations et des traitements réalisés par la personne cumulant les tâches. A défaut, il en recommandera la mise en place ;
- prise de risque au-delà des seuils de tolérance : des dépassements réguliers de limites d’engagement autorisées par les dirigeants doivent alerter l’auditeur interne. Il se chargera de connaître les raisons de ces excès et contrôlera que des intentions frauduleuses n’en sont pas à l’origine ;
- congés non pris : comme dit en propos liminaire, la fraude oblige son auteur à de multiples précautions afin que ses agissements ne soient pas révélés au grand-jour, cette discrétion se payant au prix d’une attention permanente. En conséquence, prendre ses congés représente une menace pour le fraudeur puisqu’il laissera ses travaux à la disposition d’un autre. C’est la raison pour laquelle une personne ayant fraudé, bien souvent, laisse très peu, voire pas du tout, son poste vacant. En conséquence, l’auditeur contrôlera lors de chaque mission la prise de congés par les collaborateurs de la direction concernée par l’audit ;
- évolution de comptes non justifiée : la revue analytique appartient aux outils classiques employés par les auditeurs, pour à la fois comprendre les activités auditées et s’assurer que la comptabilité s’explique, non pas pour en vérifier la sincérité et la régularité, ces objectifs de contrôle appartenant aux auditeurs externes, mais identifier le cas échéant des évolutions incohérentes nécessitant une attention particulière ;
- passage en perte opérationnelle : la comptabilisation d’une perte opérationnelle peut servir à dissimuler un détournement frauduleux. De ce fait, l’auditeur interne collectera l’ensemble des pertes opérationnelles inscrites en résultat sur la période contrôlée. Pour chacune d’elles, il en distinguera la cause et s’assurera de sa validation par une personne habilitée et différente de celle à l’initiation de l’écriture comptable.
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